La loi sur la régulation des meublés de tourisme de type Airbnb produirait-elle déjà des effets notables ? Dans le bilan d’activité du premier semestre 2025 du réseau d’agences immobilières Century 21, un chiffre retient l’attention : le nombre de ventes de résidences secondaires a chuté de plus de 20 % par rapport aux six premiers mois de 2024. A Paris, ces transactions se sont même effondrées de 43 %.

Pour Charles Marinakis, le président de Century 21 en France, ce fort repli s’explique par la hausse de la fiscalité – taxe foncière, taxe d’habitation sur les résidences secondaires – ainsi que par le « texte sur les Airbnb », autrement dit la loi transpartisane Echaniz-Le Meur. Promulguée en novembre 2024, elle rend les locations saisonnières moins attractives, puisqu’elle permet aux maires de fixer des quotas de meublés de tourisme dans leur commune, ou d’instaurer le principe d’une compensation de ces locations par la transformation d’un local en logement.

Le texte soumet aussi les nouveaux meublés à une obligation de diagnostic de performance énergétique et aux interdictions de mise en location des passoires thermiques, et revoit également à la baisse les abattements fiscaux dont bénéficiaient jusque-là les revenus tirés de ces meublés. « Les revenus disparaissent alors que les dépenses augmentent. Cela devient très compliqué de louer sa résidence secondaire sur les plateformes, or cette recette était intégrée au budget au moment de l’achat », analyse M. Marinakis.

Accès au crédit

Le marché de la résidence principale, en revanche, repart à la hausse, après le recul très marqué des ventes entamé fin avril 2022. Au premier semestre, le nombre total de transactions réalisées dans les agences Century 21 a progressé de plus de 11 %.

Ce rebond s’explique largement par l’amélioration des conditions d’accès au crédit et la baisse des taux d’intérêt, revenus à 3,1 % en mai, loin du pic de 4,2 % de décembre 2023 (hors assurance), selon l’Observatoire Crédit Logement/CSA. « L’enquête auprès des banques sur la distribution du crédit confirme une hausse de la demande de prêts à l’habitat de la part des ménages depuis le 3e trimestre 2024, parallèlement à un assouplissement par les établissements de crédit des critères d’octroi des crédits immobiliers », souligne la Banque de France dans son Panorama des prêts à l’habitat des ménages d’avril. Au regard du produit intérieur brut, la production de crédits à l’habitat est même légèrement plus élevée en France que chez nos voisins européens.

Si les ventes repartent à la hausse, c’est aussi parce que les prix de l’immobilier ont significativement reculé, à mesure que le crédit devenait moins accessible sur la période 2022-2024, avant de se stabiliser. Le prix des appartements dans les agences Century 21 a augmenté de 0,6 % sur douze mois, et celui des maisons, de 0,2 %. Le fort ralentissement de l’inflation a aussi contribué à redonner du pouvoir d’achat aux acquéreurs. Conséquence : « La tranche d’âge qui voit sa part fortement progresser est celle des 30/40 ans », représentant désormais 26,6 % du marché (+ 11 % sur un an), précise Century 21. De même, la part des ouvriers et employés parmi les acheteurs a augmenté de 33,2 % à 35,4 %. « L’accès au crédit est toujours favorable aux primo-accédants », note de son côté la Banque de France, en signalant que « l’encours des prêts à taux 0 %, dont le bénéfice est notamment soumis à des conditions de ressources, a continué de progresser ».

Une dynamique

A Paris aussi, le marché, « longtemps en panne », retrouve une dynamique, relève Century 21. Le volume de ventes a progressé au premier semestre de 6,5 % sur un an. Les prix moyens remontent eux aussi : le prix au mètre carré repasse au-dessus des 9 500 euros (+ 1,6 %). Par rapport au pic de 10 800 euros le mètre carré, atteint au premier semestre 2020, le prix moyen actuel a certes perdu 12 %, mais il reste encore 17 % plus élevé qu’en 2015, selon les chiffres de l’enseigne (qui ne tiennent pas compte de l’inflation).

En Ile-de-France, les volumes de transactions ont augmenté très fortement au cours des six premiers mois de l’année (+ 16,5 % sur un an pour les appartements et + 14,6 % pour les maisons). Sur dix ans, les prix des appartements y ont grimpé de 25 % et le montant moyen d’une maison atteint 380 000 euros, contre 294 000 euros en 2015.

Toutes les autres régions ont également enregistré une hausse du volume de transactions, « une première depuis la création des nouvelles régions en 2015 », souligne Century 21, qui évoque « un redémarrage en profondeur de la demande ». L’activité a été particulièrement dynamique au premier semestre dans les Pays de la Loire (+ 19,4 %), en Nouvelle-Aquitaine (+ 19,2 %) et en Centre-Val de Loire (+ 17,3 %).

Dernier enseignement du bilan semestriel de l’enseigne, le retrait de 3 % des investissements locatifs, qui représentent désormais moins d’une transaction sur quatre, soit le niveau le plus bas depuis cinq ans. L’évolution est encore plus nette à Paris, où la part des investissements locatifs a reculé de plus de 8 % en un an. « Conjuguée à un net recul de la production de logements neufs, la tension locative est de plus en plus préoccupante. Contrairement au marché de la transaction, rien ne laisse augurer d’un avenir plus positif à court et moyen terme », déplore le réseau, également spécialisé dans la gestion locative.

Inquiet de cette baisse du nombre de logements à louer, le gouvernement a chargé deux parlementaires, le sénateur Marc-Philippe Daubresse (Nord, Les Républicains) et le député Mickaël Cosson (Côtes-d’Armor, MoDem), de travailler sur un « statut du bailleur privé », six mois après la fin du dispositif « Pinel ». Ils présenteront ce lundi 30 juin leur rapport à Valérie Létard, ministre chargée du logement, leurs pistes pour relancer l’investissement locatif privé et, en particulier, un rééquilibrage de la fiscalité pour encourager les propriétaires à louer leur bien à titre de résidence principale, plutôt qu’en meublé de tourisme.

LE MONDE - Par Véronique Chocron - Publié le 30 Juin 2025

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